fbpx

Le sommeil et l’allaitement

Nous recevons très souvent des questionnements des mamans sur le sommeil de leurs enfants. D’ailleurs celui-ci est une préoccupation très récente et conditionnée culturellement. De nombreuses cultures comme en Afrique ou en Asie qui pratiquent le partage du lit, l’allaitement à la demande, et le portage, ne se questionnent pas autant que les régions Nord Américaines et Européennes. Les personnes de ces cultures sont même surprises de notre façon de faire.

Les normes culturelles actuelles ne sont pas en faveur du sommeil partagé. Certains professionnels ou l’entourage de la mère vont même jusqu’à mettre en cause l’allaitement, lors des réveils nocturnes fréquents ou des courtes siestes de l’enfant. 

Toutes ces normes culturelles ont amené de nombreux mythes

    • “L’enfant nourri au biberon dormirait plus longtemps que celui qui est allaité” : à ce jour aucune étude n’a prouvé qu’un enfant nourri au biberon dormirait plus longtemps qu’un bébé allaité. 
    • “Ne pas endormir un bébé au sein, ça lui donne de mauvaises habitudes” : grâce à l’hormone appelée ocytocine, la mère et l’enfant trouvent le sommeil plus rapidement et ont un sommeil plus réparateur.
    • Un bébé a besoin de s’endormir seul pour apprendre à se rendormir seul la nuit” : de nombreux ouvrages, nous expliquent comment “éduquer” nos enfants au sommeil, cependant ces affirmations, et ces méthodes pour faire dormir les enfants à tout prix doivent être nuancées. En effet, les dernières découvertes en neurosciences nous apportent des éclairages notamment sur les effets néfastes du stress sur le développement psycho affectif de l’enfant.
I. La physiologie du sommeil :

 Le sommeil est un processus qui évolue tout au long de la vie et qui s’adapte aux besoins de l’être humain. Il en va de même pour la qualité du sommeil. Le sommeil ne s’enseigne pas. C’est un processus d’acquisition, tout comme la marche ou la continence. Nous entendons souvent parler des méthodes pour “éduquer nos enfants au sommeil”, le sommeil ne s’apprend pas, c’est une évolution naturelle de l’espèce humaine.

Chaque enfant est différent et a ses propres besoins, c’est pourquoi nous pouvons observer des amplitudes horaires très larges, allant de 8 à 20 heures pour le nouveau-né et de 10 à 14 heures pour les enfants de plus de 12 mois. Ces heures de sommeil sont réparties sur 24 heures sans distinction entre le jour et la nuit. 

Le sommeil est composé de plusieurs cycles, chez l’adulte comme chez l’enfant. Le cerveau du tout petit n’est physiologiquement pas mature pour “faire ses nuits”, les réveils nocturnes sont donc tout à fait normaux.

Par exemple, plus l’enfant est jeune, plus la durée du cycle du sommeil léger est importante, c’est durant cette phase de sommeil léger que la croissance cérébrale est maximale.

Durant cette phase de croissance cérébrale, les besoins énergétiques de l’enfant sont très importants, le lait maternel répond spécifiquement à ces besoins.

Il peut être intéressant d’observer son bébé pour comprendre son rythme et ses besoins. Cela permet de repérer son rythme de sommeil ainsi que les horaires d’éveil et de coucher enfin de s’adapter à son rythme.

II. Les cycles du sommeil :

Le sommeil de l’enfant s’organise par cycles, tout comme celui de l’adulte. 

Chaque cycle comprend :

  • La veille : temps d’éveil   
  • Le sommeil lent ou calme : c’est le sommeil plus ou moins profond, cette phase comporte 2 étapes :
  • l’endormissement 
  • le sommeil léger 
  • Le sommeil paradoxal : la période pendant laquelle le cerveau est actif, c’est durant celle-ci que l’enfant rêve. Il présente parfois même des mouvements oculaires rapides, des mouvements de succion, sourires, grimaces, respiration irrégulière

Chaque nuit peut comprendre jusqu’à 4 à 6 cycles de sommeil et leur durée varie selon l’âge

  • Nouveau-né (0 à 10 mois) : 50 min
  • Nourrisson (10 mois à 2 ans) : 70 min 
  • Grand enfant (2 à 6 ans)  : de 90 à 120 min
    1. Entre 0 et 3 mois : 

Les nouveaux-nés ne peuvent pas dormir en continu car ils ont besoin de s’alimenter fréquemment pour assurer leur croissance et éviter les hypoglycémies. C’est pour cela qu’il peut ne pas avoir de longues périodes de sommeil et que l’on conseille un allaitement à la demande, qui est parfaitement adapté à ses besoins !  

Le sommeil a plusieurs caractéristiques : 

  • Biphasique : comporte deux phases, le sommeil agité et le sommeil calme
  • Ultradien : sommeil qui ne fait pas de différence entre le jour et la nuit.
    Si le nouveau-né satisfait aussi ses besoins la nuit, il peut aussi parfois s’adapter en fonction de son environnement et son rythme familial. En effet, il va repérer les rituels au fil des semaines, les moments du quotidien plus calmes (la nuit) et ceux plus agités (le jour) et il va percevoir la différence de luminosité, c’est pour cela qu’il est conseillé d’éviter de faire les siestes dans le noir complet, enfin de continuer à percevoir la différence jour/nuit. Ceci pourrait également expliquer en partie le fait que certains nourrissons enchaînent très tôt plusieurs cycles 
  • Poly Séquentiel : le sommeil se répartit en plusieurs cycles tout au long de la journée 

2. Entre 3-4 et 7-9 mois :

À partir de 4 mois, l’enfant risque moins l’hypoglycémie, l’allaitement est bien mis en place. Le sommeil devient alors :

  • Circadien : il prend en compte la différence jour/nuit
  • Polyphasique : il a acquis toutes les phases de sommeil adulte, il se prépare à dormir plusieurs cycles d’affilée, ce qui explique les micro-réveils plus nombreux qui sont fréquents à la fin d’un cycle de sommeil.
  • Instable : c’est une période de transition, l’enfant commence à acquérir les 3 phases de sommeil contre deux précédemment, et doit donc s’adapter, ce qui explique les réveils fréquents.

Il ne faut pas oublier que cette période est aussi synonyme d’autres changements tels que la reprise du travail pour maman, la découverte d’un nouveau lieu de vie (nounou, crèche … ) et la diversification alimentaire après 6 mois. Ces changements peuvent également générer des réveils plus fréquents. 

3. Entre 9 mois et 3 ans : 

Les cycles se déroulent

  • Le sommeil léger
  • Le sommeil profond
  • Le sommeil paradoxal

En début de nuit, ils enchaînent les périodes de sommeil lent léger/lent profond avant d’atteindre le paradoxal, ce qui explique qu’ils arrivent souvent à dormir plusieurs heures d’affilée en début de nuit avant de se réveiller plusieurs fois.

Lors de la 2ème année de vie, les enfants ont tendance à se réveiller la nuit, avec des pleurs, surtout en deuxième partie de nuit.

Plusieurs facteurs entrent en jeu dans cette étape, qui peuvent expliquer le sommeil perturbé de l’enfant

  • L’introduction de la diversification alimentaire 
  • La découverte de l’environnement, développement psychomoteur 
  • Les poussées dentaires 
  • L’acquisition de la continence entre 2 et 5 ans 

4. Entre 3 ans et 6 ans :

Les cycles se déroulent

  • Le sommeil léger
  • Le sommeil lent profond
  • Le sommeil lent très profond
  • Le sommeil paradoxal

Aux alentours de 3-4 ans, on peut observer une réduction des temps de sieste et une amélioration du sommeil nocturne. C’est une étape de maturation personnelle, un besoin de faire les choses seul.

Entre 5 et 6 ans, la majorité des enfants n’ont plus de réveils nocturnes grâce à la maturation cérébrale qui leur permet d’avoir des cycles de sommeil proches de l’adulte. Mais aussi grâce au fait qu’ils parviennent plus facilement à exprimer leurs émotions, leurs peurs.

III. Le sommeil de la maman allaitante :

Au cours des tétées, de nombreuses hormones sont libérées qui jouent un rôle sur le sommeil de la mère

  • L’ocytocine qui favorise un état de détente et d’apaisement, ainsi que le repos. 
  • La prolactine qui accélère le passage en sommeil lent, celui-ci joue un rôle dans la récupération physique. 
  • Les bêta-endorphines et la dopamine jouent un rôle dans le sentiment de plaisir et facilitent les réveils pour répondre aux besoins de son enfant.

De nombreuses études ont été menées sur le sommeil de la maman allaitante. Elles ont démontré que les mères qui allaitent ont un sommeil lent et donc réparateur plus long que celles qui n’allaitent pas. Certaines études ont même démontré que les couples parentaux dont la maman allaite, dorment plus.

IV. Le sommeil partagé ou cododo favorise l’allaitement maternel :

Le sommeil partagé ou cododo est une pratique de sommeil où le nourrisson partage une surface de sommeil avec sa mère / ses parents.

Les deux seuls facteurs qui favorisent naturellement le sommeil sont l’allaitement et le “cododo” ou le sommeil partagé. L’allaitement maternel favorise le sommeil grâce au L-tryptophane que contient le lait maternel. Ce dernier est un précurseur de la sérotonine et de la mélatonine (souvent appelée « hormone du sommeil »).

Les bienfaits du cododo

  •  favorise l’évolution naturelle du sommeil, en effet l’enfant passera plus aisément d’une phase de sommeil à l’autre en réglant sa respiration sur celle de sa maman.
  • le contact proximal entre la mère et son enfant facilite les réponses rapides à ses besoins et assure un confort psychologique et un sentiment de confiance et de rassurance autant chez l’enfant que pour la maman

Le cododo a des effets bénéfiques dans la mise en place de l’allaitement maternel

  • Facilite les tétées nocturnes en évitant à la maman de se lever et donc d’être complètement réveillée
  • Engendre une synchronisation des rythmes du sommeil
  • Augmente considérablement les taux et les durées d’allaitement  
  • Facilite l’accès aux seins pour l’enfant 
  • Favorise le sommeil de l’enfant et aide à l’acquisition naturelle du sommeil

Il y a tout de même des petites conditions à respecter pour pratiquer le cododo

  • Pas de tabagisme passif et/ou tabagisme maternel et paternel
  • Bébé est couché sur le dos
  • Pas de consommation d’alcool ou de produits altérant l’état mental des adultes qui partagent le lit
  • Pas de médicaments type somnifères 
  • Ne pas couvrir le bébé, pas d’oreiller, s’assurer que rien ne peut venir couvrir la tête de bébé
  • Une surface sécurisée et plate, un matelas ferme, (pas de canapé, divans ou literies molles/ à eau)
  • Ne pas pratiquer si un des parents est en obésité morbide
  • Ne pas laisser l’enfant seul dans le lit adulte
V. Les autres astuces : 
  • les massages bébés : certaines études montrent qu’un massage avant le coucher est bénéfique sur le sommeil du nouveau-né
  • la mise en place de rituels
  • les bruits blancs 
  • les siestes de la journée dans les lieux de vie de la maison 
Conclusion :

Comprendre le sommeil de bébé permet d’accepter plus facilement les réveils nocturnes. Le principal, est de réussir à trouver un équilibre qui convienne à sa propre famille, et à chaque individu. Il est primordial de faire les choses par envie et conviction  et non parce que cela est recommandé par un/des professionnel(s) de santé, une grand mère, une tante ou encore la voisine. Faites vous confiance avant tout, vous êtes acteurs de votre vie et vous êtes les seuls à savoir ce qui convient le mieux à votre enfant et votre famille.

Émeline Pérois pour l’Allaitement Tout Un Art

Sources :